Jacques Devienne (promo 67 70) nous rapporte cette anecdote concernant un directeur d'école normale, très discret, Monsieur Virel, que les élèves-maîtres de l'époque 1967-1976 ont connu forcément même si ses apparitions étaient rares dans les couloirs de son école. La porte de son bureau était d'ailleurs, comme c'est rappelé dans cet article, agrémentée d'un feu tricolore (pour filtrer les solliciteurs)

Bonjour,


Tu voudras bien trouver ci-joint le récit d'une anecdote concernant un ancien directeur de l'ENG. Amicalement Jacques DEVIENNE (67/70)


A BON ENTENDEUR…


     Il me reste pas mal de souvenirs plus ou moins agréables des années passées à l’école normale de Douai. La lecture de la liste des anciens directeurs de cette vénérable institution a ravivé l’un d’eux.

Un surveillant entre dans la classe pendant un cours et s’adresse à moi : « Devienne vous êtes convoqué chez Monsieur le Directeur ». Il sort sans plus d’explications. J’essaye de me concentrer sur le cours mais les questions se bousculent dans ma tête : « pourquoi cette convocation ? pourquoi moi ? ai-je commis quelque chose de répréhensible ?" A l’heure dite j’arpente, un peu inquiet, les couloirs dans la direction du bureau de Monsieur le Directeur.


Dans l’antichambre je retrouve quelques camarades et nous découvrons que nous sommes tous musiciens ; la convocation doit donc avoir rapport avec la demande d'autorisation de sortie que nous avons déposée pour aller suivre les cours au conservatoire. Cette hypothèse détend un peu l’atmosphère en dépit de la solennité du décorum ; double porte capitonnée et feu tricolore (!) à l’entrée du Saint des Saints .


Nous entrons dans le temple et nous nous alignons debout devant le bureau. Monsieur le Directeur commence à nous délivrer son message, il est question de " chance que nous avons d'obtenir cette autorisation", "de confiance qui nous est accordée","de responsabilité de futurs éducateurs"... Il parle très bas, il chuchote presque, ses propos sont difficilement perceptibles et nous sommes tous très concentrés. Je remarque un peu plus tard que mon voisin, par ailleurs excellent pianiste (il s'appelait, je crois, Merlin) tourne lentement la tête pour diriger son oreille droite vers Monsieur le Directeur et mieux entendre. Il fait ce geste très lentement pour éviter qu'il ne soit remarqué et j'ai très envie d'en faire de même. Soudain le Directeur s'adresse à lui :

- "Monsieur vous êtes musicien ?"

-"Euh... oui ..." bafouille mon voisin

-"Et vous ne m'entendez pas ?" dit le Directeur dont la voix est devenue soudain beaucoup plus forte et dont la colère est perceptible.

- "Euh... j'ai un peu de mal..."

- "vous avez des problèmes d'audition ? c'est gênant pour un musicien..."

- "euh, non, je ne crois pas ..."

La tension est forte je pense que mes camarades ont, à ce moment, envie de dire : "nous non plus nous n'entendons pas" mais personne n'ose intervenir. Monsieur le Directeur reprend son discours il est manifestement déstabilisé et je dois avouer que je redoute d'être saisi d'un rire nerveux. 

Au sortir du bureau notre autorisation en main nous n'avons pas pu nous empêcher de charrier notre camarade et son "oreille absolue". Aujourd'hui je me demande quelle serait la réaction des jeunes lycéens face à pareille scène... Autre temps ...


Jacques DEVIENNE (promo 67/70) 


PS : si quelqu'un a dans ses archives une photo de M. Virel, nous sommes preneurs afin de poursuivre sur le site internet de l'amicale l'évocation des 19 directeurs qui se sont succédé à la tête de l'école normale d'instituteurs de Douai de 1834 à 1991


Cet article a inspiré le commentaire suivant d'un de nos lecteurs, nous le reproduisons dessous :

17 mars 2021 à 11:24
Monsieur Virel, par sa personnalité, sa tenue, instaurait volontiers une certaine distance avec les normaliens... et les autres. Ses cheveux ondulés, argentés lui donnaient une prestance distinguée et accentuée par ses tenues vestimentaires: costumes sobres, noeud papillon...démarche mesurée, port de tête...Que dire quand il passait au volant de sa DS Citroen noire.. très ministérielle, le tableau était complet...il impressionnait.. J'en avais parlé avec Monsieur Joly, qui voyait là une façade pour une personnalité peut-être anxieuse ???...

Un nouvel exemplaire du journal normalien ÉLAN de l'année scolaire 1966 1967 scanné par notre camarade Bernard Stienne

 Page de couverture D'ÉLAN N°5 (1966-1967)



SOMMAIRE



En feuilletant les pages de ce numéro, nous avons découvert un contenu riche et varié malgré les moyens limités en impression. Le sommaire ne nous en donne qu'un aperçu imparfait :

- la tribune libre aborde la question ce cette catégorie de  normaliens éternels insatisfaits et négatifs dans leur comportement. 

- "Algérie 65" rend compte d'une rencontre avec des instituteurs français en Algérie dans le cadre d'un stage effectué avec le syndicat par deux normaliens de 4B, Michel Laurent et Jacques Legoeul, 3 ans seulement après l'indépendance. C'est très instructif

- "à propos de la Coopé" qui évoque les débats d'alors sur son fonctionnement et sa finalité et qui est signé par l'ancien président Laurent Michel et le nouveau H.P. Tetard (sc ex 2)

- "Mode en 65" par Hubert Quennesson (Philo) sur un ton humoristique

- "la jeunesse délinquante" et l'éducation surveillée : voilà un très bon article de fond bien étayé par des entrevues avec M. Berton, substitut du procureur de la République auprès du tribunal de grande instance de Douai, Mecz, délégué permanent à la liberté surveillée, Gorillot, directeur du centre d'apprentissage artisanal de Phalempin

- "dans la Rue", un fait divers sordide puisqu'il s'agit d'un accident mortel raconté avec talent par Lucien Roche de 4B

- "Fonction du cinéma" par Laurent Michel 4B

- "le Carnaval"  ses origines et ses variantes de Nice à Dunkerque par Patrick Patte 2D


Voici l'introduction du récit de la rencontre avec des instituteurs français à Alger en 1965 : 

"ALGÉRIE 65

Délégués du Syndicat national des Instituteurs, nous avons effectué du 10 au 18 avril un stage de formation à ALGER, en collaboration avec les camarades de l’APIFA (association professionnelle des Instituteurs Français en Algérie ).

Influencés par des journaux tels que Paris-Match, France-Soir , etc.., nous pensions trouver dans ce pays nouvellement indépendant deux catégories d'individus : d'une part, les Algériens que  l'on croyait farouchement anti-Français, et d'autre part, les résidents Français que nous soupçonnions fort de néo-colonialisme .

La réalité est autre ."


ON POURRA LIRE INTÉGRALEMENT CE NUMÉRO DE 36 PAGES EN FORMAT PDF SUR LE NOUVEAU SITE DE L'AMICALE DES ANCIENS NORMALIENS DANS LA PAGE "L'OEUVRE DES NÔTRESEN CLIQUANT SUR CE LIEN

En février 2007, Stéphan Marcinkowski est fait Chevalier dans l'Ordre National du Mérite

Paul Majowski (promo 58 62)  a filmé la cérémonie qui s'est déroulée dans l'ancienne chapelle de l'ex-école normale de Douai. 

Dans la première vidéo, on prendra connaissance de l'éloge rendu par son camarade de promo Christian Lelièvre (promo 54 58). On reconnaîtra avec émotion Jean Joly évoquant en quelques mots les mérites de Stéphan, lequel est, ne l'oublions pas, président de l'amicale des anciens normaliens de Douai depuis 40 ans



 

Dans la deuxième vidéo, le discours de Jean-Yves Herbeuval, Inspecteur général de l'Éducation Nationale, parrain du récipiendaire.



Dans la troisième vidéo, le discours de remerciement de Stéphan Marcinkowski :






Festival des nomades par Bernard Stienne (promo 66 71)




Suite à l'information sur le festival des nomades animé par notre ami instituteur à M'Hamid el Ghizlane (Maroc) parue sur le blog de l' E.N., je peux mieux vous le faire connaître. J'ai retravaillé une vidéo où il apparaît. Noureddine Bougrab marque le rythme du pied à la seconde 40 puis on le retrouve à la 4ème minute. Voici le lien:



Vers la fin de cette vidéo je donne un autre lien, du même artiste Bombino, où il se retrouve chez lui à Agadès au Niger. J'apprécie beaucoup ces images car on s'y sent vraiment ailleurs. En ces temps de confinement, un peu d'évasion ne fait pas de mal !

Bon week end, bonne lecture et bonne vidéo !



Bernard STIENNE

Qui se souvient de Roger Beaucarne, l'avant dernier directeur de l'école normale d'instituteurs de Douai de 1976 à 1984 ?


Dans cet article de la Voix du Nord de décembre 1984, on salue son parcours, lequel ne s'est d'ailleurs pas arrêté à Douai puisqu'il termina sa carrière comme Inspecteur d'Académie à Périgueux où il fut décoré de la légion d'honneur en 1993, à son départ en retraite. Plus de détails sur sa brillante carrière sur notre site dans la page consacrée aux directeurs d'école normale de Douai. (cliquer sur le lien)






 

Bernard Mutelet, le dernier à avoir dirigé l'école normale d'instituteurs de Douai. Georges Wosik, promo 76 78, nous fournit deux textes précieux sur son arrivée à Douai en 1984 et son départ en 1991

 

Qui se souvient de Bernard Mutelet ? Il fut le dernier des directeurs de l'école normale de Douai, de 1984 à 1991, date de la création des IUFM. Nous lui avons consacré un article sur notre nouveau site normalien (cliquer sur le lien ) mais nous faisons appel à ceux qui l'ont connu pour nous aider à compléter la fiche biographique qui lui est consacrée. Envoyez vos témoignages ou documents à engiufmdouai@gmail.com


En réponse à notre appel, nous avons reçu de Georges Wosik, promo 76 78, ancien Responsable Pédagogique du Site IUFM de
Douai (2011-2012), le message suivant accompagné de 2 textes fort précieux que nous publions ci-dessous :

"Bonjour,

Suite à votre demande, je vous envoie 2 documents que vous pouvez publier dans le prochain bulletin de l'amicale :

- le premier, retrace l'arrivée de Bernard Mutelet à l'ENG

- le second est le discours énoncé par Pierre Herlent le 28 juin 1991 lorsque monsieur Mutelet quitte Douai : c'est en fait un discours qui retrace avec beaucoup de subtilité et d'humour les 7 années de direction  de Bernard Mutelet. Je vous souhaite bonne réception et reste à votre disposition." 
Georges Wosik


Premier texte :


L’arrivée de Bernard Mutelet un 24 août 1984


Après huit années passées à diriger l’Ecole Normale d’Instituteurs de Douai (de 1976 à 1984), Roger Beaucarne est nommé à l’EN de Lille. Fin août, je revois mon ancien Directeur qui m’annonce la venue de son successeur,   Bernard Mutelet en provenance d’Albi : je suis chargé de l’accueillir à l’ENG le vendredi 24 août.
Régulièrement, je guette l’entrée de la rue d’Arras. Brusquement, la sonnerie stridente du téléphone de service retentit vers 17 heures 30 : au bout du fil, une voix qui m’est familière, celle de monsieur Teston, concierge à l’Ecole Normale d’Institutrices. Il me demande de le rejoindre car un certain Bernard Mutelet s’est présenté au 161 de la rue d’Esquerchin prétendant être le nouveau Directeur !

J’arrive au pas de course rue d’Esquerchin : Une Peugeot 604 bleue immatriculée dans le Tarn, attelée à une caravane, barre l’entrée de l’ENF !
Monsieur Teston, visiblement paniqué, m’annonce que ce monsieur qui se tient debout près de sa voiture s’est présenté à lui en déclarant être le nouveau directeur alors que le matin même il avait encore croisé monsieur Élie Savoye (*) et que ce dernier n’avait nullement évoqué son départ de l’ENF !
Je m’avance vers Bernard Mutelet, visiblement surpris par la gêne occasionnée :
- je suis le nouveau directeur de l’Ecole Normale de Douai, j’ai appris ma nomination par téléphone (ministère) il y a peu de temps, me dit-il en toute humilité et en me serrant la main
- je suis bien au courant de votre venue lui répondis-je, en réalité il y a 2 Écoles Normales à Douai ! Vous n’êtes tout simplement pas à la bonne adresse !
Quiproquo levé, donc ! En soirée, après avoir échangé longuement avec mon nouveau Directeur, Bernard Mutelet m’a donné l’explication de son arrivée à l’ENF : lorsqu’il était IEN à Roubaix, il était venu en tant que membre d’un jury à l’ENF et il ignorait que Douai comptait sur son territoire deux écoles normales distinctes.
(*) : Élie Savoye a été directeur de l’ENF de 1983 à 1988. Il est décédé en 2011. (M. Chabbert deviendra le premier directeur d'un I.U.F.M. qui regroupe les deux ex-Écoles Normales, et voit " la Chute du mur de Douai ").                                      
                                                          Georges WOSIK

deuxième texte :


Discours de Pierre Herlent (professeur agrégé de Lettres à l’ex.ENG) lors du départ de Monsieur Mutelet et de Mademoiselle Vandrisse 

(Discours prononcé le 28 juin 1991 dans la chapelle de l’ex ENG)

Monsieur le Directeur, madame l’Attachée d’Intendance, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,

 Lorsqu’un nouveau venu prend ses fonctions dans un établissement, les discours qui l’accueillent -pour sympathiques qu’ils soient- n’en demeurent pas moins, d’une relative brièveté. Il n’en est pas de même lorsqu’ils s’en vont. Je vois deux raisons à cet état de fait :
La première est que les nouveaux arrivants sont souvent peu connus, mal connus, voire totalement inconnus de ceux qui les reçoivent comme collègues ;
La deuxième, surtout lorsqu’il s’agit de personnalités dotées d’un pouvoir dirigeant, parce qu’il est prudent de rester prudent, et de ménager l’avenir.
En revanche, la même circonspection n’est plus de mise le jour d’un départ : il n’y a plus d’avenir à ménager. En outre, dans l’intervalle des liens ont été noués, tout un passé de bons et de mauvais moments s’est tissé avec lesquels il faut comme au rugby, opérer une sorte de transformation : les faire entrer dans la mémoire. C’est, je crois le sens des mots que je vais prononcer maintenant, même s’ils n’engagent que moi et si chacun à accomplir pour lui ce travail de catharsis.

Vous m’avez confié un jour, sous le sceau du secret, c’est-à-dire, probablement dans la galerie, qu’avec la maturité, sinon une passion, du moins un goût plus prononcé vous était venu pour l’histoire. C’est donc en historien que je tenterai de dresser à grands traits le bilan de ces années que vous avez passées dans notre ancienne Ecole Normale. Je ne doute pas que, ce faisant, je fasse la preuve, à l’inverse que je n’ai jamais eu le moindre talent pour entretenir avec Clio, la muse qui vous chatouille, autre chose que des rapports de bon voisinage. Ces années que vous avez passées ici comme Directeur, la tentation est forte de les désigner par les mots de « règne », ou de septennat. S’il m’arrive d’employer ces termes, j’espère qu’on n’y entendra pas malice : je n’en ai pas trouver d’autres. Le mot « mandat » ne convient évidemment pas. Qu’on admette donc qu’il s’agit de simples métaphores.
Je commencerai par votre travail à l’intérieur. Certains s’attendent peut-être à des révélations fracassantes sur votre service de renseignements, à l’ouverture d’un dossier sur des micros secrets, des écoutes téléphoniques. Je ne m’y risquerai pas. Vous avez sans doute été informé, mais je laisse aux oubliettes de l’histoire, l’entier mystère de ce savoir faire.
On m’a dit aussi que vous aviez eu en matière de cabinets -c’est bien du domaine de l’intérieur dont je parle- une politique audacieuse, marquée par un égalitarisme volontaire et une opiniâtreté à l’égard notamment des services de mademoiselle Vandrisse qui fut triomphante. Vous en parlerez peut-être et sans doute mieux que moi.
Non, ce que je voudrais souligner aujourd’hui, d’un point de vue purement professoral peut-être, dont je m’excuse, c’est la somme considérable de papiers que vous nous avez fait remplir :
- vous avez toujours eu une affection particulière pour les cahiers d’U.F.(1), témoins de l’activité débordante de cette école ;
-vous avez agi avec insistance pour que soient établis avec les élèves ces contrats irréprochables que nous appelions « plans d’U.F. (2) et qui devaient nous assurer de solides arrières ;
-vous avez rétabli, pour ce qu’un collègue (3) aujourd’hui émigré dans le Velay appelait la « levée d’écrou », à savoir les autorisations de sortie, la règle qui consiste à les remplir en triple exemplaire, conformément sans doute à un article précis du règlement que vous sauriez nous citer de mémoire ;
- vous avez présidé à la refonte de ces cahiers de stages pour lesquels les instituteurs et les formateurs ont toujours montré des sentiments mitigés ;
- enfin, vous avez eu un respect très particulier pour ce cahier de concertation, recueil de nos décisions communes, dont vous aviez grand soin de vérifier l’inscription surtout quand elles émanaient de votre pensée par un péremptoire « notez monsieur Wosik » et où personnellement je n’ai jamais retrouvé la substance de mes interventions pourtant subtiles. Avez-vous conscience, madame l’Intendante, d’avoir financé ces dépenses somptuaires en papier et d’avoir ainsi contribué sinon au déboisement du patrimoine français, du moins au déficit de la balance nationale ? Quoi qu’il en soit, monsieur le Directeur, vous laissez derrière vous des archives colossales. A ce propos, laissez moi poser une question et exprimer une inquiétude : que vont devenir ces papiers précieux, témoins d’une vie exubérante, d’une créativité inépuisable et des conflits inévitables qui les ont ponctués ? Les avez-vous microfilmés ? Avez-vous songé à les mettre à l’abri de l’envahisseur ? Nul doute qu’ils pourraient servir à nourrir un jour, la réflexion d’un chercheur en Sciences de l’Education s’interrogeant sur la protohistoire des Centres Universitaires de Formation des Maîtres.
Si j’ai bien compris, en matière de gouvernement, votre regard a toujours été tourné vers l’Est. Le concept de perestroïka, devenu dans votre bouche la transparence, a été une clé de voûte de votre septennat. C’est à vous, plutôt qu’aux événements relativement récents des pays Baltes que nous devons d’avoir ouvert les yeux sur les limites d’une politique inaugurée par monsieur Gorbatchev. Et il me semble que dans les signes lisibles aujourd’hui, on peut relever, qu’au moment où vous partez pour Villeneuve d’Ascq, vient au premier plan monsieur Elstine, grâce auquel vous pourrez modifier vos chevaux de bataille. Vous voilà peut-être entré dans une phase de libéralisme centraliste ?

Mais venons-en aux relations extérieures : j’irai vite. Vous avez été un homme d’accueil et d’ouverture sur l’étranger. Je ne citerai pas ici les divers organismes qui ont trouvé asile dans notre enceinte. Mais c’est à vous que nous devons d’avoir reçu plusieurs années de suite des étudiants marocains ainsi que des religieuses venues du Liban. Cette ouverture de nos frontières est indéniable, et sont tout à votre honneur. Elles ont valu, à mademoiselle Vandrisse et moi-même, une visite nocturne du métro de Lille qu’elle ne connaissait pas. Nous avions pris, avec le professeur marocain que nous chaperonnions, la place fictive du conducteur ; le vent s’engouffrait dans nos cheveux, la vitesse nous grisait, nos yeux scrutaient l’obscurité blafarde… Une tranche de vie dont je me souviendrais longtemps et que nous devons à vous, monsieur le Directeur.
Nos pires ennemis sont nos voisines les plus proches. Vos rapports avec nos collègues de l’Ecole Normale d’Institutrices ont toujours été d’une extrême rigueur comparable, mutatis mutandis, aux réticences d’une madame Thatcher vis à vis de ses partenaires européens ou plus lointainement d’un certain Général.
Vous avez su faire taire les sirènes d’une collusion trop rapide, bien qu’inéluctable aujourd’hui. Tout en ménageant la nécessaire collaboration, vous avez su maintenir les distances garantes de l’identité des uns et des autres. Bref, pour prendre un langage imagé, vous avez pratiqué la politique de la petite porte ouverte, sans adopter celle de la démolition des murs.
Néanmoins, lorsque vous êtes arrivé, à Douai, un certain 24 août 1984, par la voie royale de la rue d’Esquerchin, il paraît que c’est au numéro 161 que vous vous êtes présenté. Permettez-moi d’émettre ici une question et ce n’est plus l’historien qui analyse mais la psychologie des profondeurs qui s’interroge : n’y-a-t-il pas eu dans cet acte manqué, les prémices douloureux d’un désir latent, refoulé, la naissance d’un amour d’autant plus violent et ambigu qu’il ne trouva jamais son accomplissement ?

Les grands règnes sont des règnes de bâtisseurs. Les grandes civilisations laissent des temples. Je n’en finirais pas d’énumérer, les pyramides, le Parthénon, Versailles, le Centre Pompidou, l’Arche de la Défense… Je compte à votre actif, et à celui de madame la surintendante, avec laquelle vous formez le couple infernal dans l’Histoire, non seulement d’avoir contribué au maintien du monument aux vivants que votre prédécesseur (4) avait érigé, en exigeant sa restauration par les mains iconoclastes qui l’avaient endommagé -lors d’une invasion barbare- mais encore d’avoir ajouté à l’embellissement de notre parc, en présidant à la construction, en apparence plus modeste, mais bien mieux située, d’un canon solaire.
Permettez-moi une rapide et superficielle étude comparative de ces deux chefs-d’oeuvre : ils sont tous deux situés dans les extérieurs et destinés à braver les intempéries. Que feraient-ils dans une de nos salles ? Ils sont constitués l’un et l’autre des mêmes matériaux : une base de maçonnerie, une ornementation de terre cuite et vernissée. Ils comportent chacun des inscriptions. Face à l’avenir qui nous préoccupe tous, je me pose néanmoins quelques questions. Nos petits enfants de l’an 2000, devant ces énigmes architecturales sauront-ils encore reconnaître que la spirale du monument aux vivants a été calculée approximativement dans un rayon variable sur la trajectoire de la comète de Hallez ? Sauront-ils deviner que votre fameux canon, que je n’ai jamais entendu fonctionner, pareil à l’Ixion cher à Apollinaire, vous savez, ce personnage mythique qui engrosse les nuages, ce fameux canon dis-je, est autre chose qu’un hymne vibrant et sempiternel, aux brumes, aux brouillards, à la bruine du printemps et à tous les miasmes polluants ?
Il est temps de citer pour montrer l’ultime élégance de votre fin de règne un proverbe anglais. Excusez mon accent : « When the boat sinks, the captain has to drink the cup », ce qui veut dire : quand le bateau coule, le capitaine doit boire la tasse. Vous avez réussi, monsieur le Directeur, madame l’intendante, à faire coïncider la fin des Ecoles Normales avec la fin de votre fonction, si bien que j’en suis intimement convaincu, personne n’évoquera avec nostalgie les figures marquantes qui ont présidé à ces temps. Pour ma part, j’espère avoir contribué modestement à célébrer l’événement de cette révolution, au sens où quelque chose est maintenant révolu.
Il me fallait pour terminer une dernière métaphore : vous affectionnez les comparaisons guerrières. Combien de fois m’avez-vous dit que vous étiez, que nous étions « toujours sur la brèche ! » J’informe au passage les populations qu’une brèche vient de s’ouvrir à Villeneuve d’Ascq. Je crains néanmoins que cette image ne donne à notre Education Nationale la réputation d’être un peu ébréchée. La métaphore que je choisirai est d’ordre sportif : au moment où vous prenez un nouveau départ sur les starting-blocks de l’IUFM, je souhaite que vous entriez d’un pas allègre et entraîné dans la destinée incertaine qui s’ouvre ainsi, en vous souhaitant qu’elle vous mène quelque part !
Et puisque vous partez, monsieur le Directeur, madame l’Intendante : A VOS MARQUES !

                                        Pierre HERLENT


(1) cahiers d’U.F : cahiers des unités de formation. Documents rédigés par les formateurs quant aux contenus disciplinaires à dispenser 
(2) plan d’U.F : déroulement de l’unité de formation à l’intention des élèves instituteurs (modalités d’évaluation)
(3) il est fait référence à Marcel Laisne (collègue de français) qui avait obtenu sa mutation pour l’Ecole Normale du Puy en Velay.
(4) Roger Beaucarne avait fait ériger en 1983 un monument aux vivants où figuraient les noms d’anciens normaliens ayant une fonction élective






Bernard Stienne (promo 66 71) est aussi un globe trotter campingcariste. Il nous fait part de sa passion pour le festival des nomades organisé au Maroc par un ami instituteur, Noureddine Bougrab. Sa chaine Youtube connaît un vrai succès avec près de 13000 abonnés


 Bernard Stienne a pu cette année passer du temps dans ses archives à retrouver et scanner des numéros du journal normalien "ÉLAN". Fidèle adhérent de notre amicale, il est malheureusement absent à nos assemblées générales annuelles car à cette date-là, avec son camping-car, il se rend depuis quelques années au Maroc, au printemps, pour vivre à proximité des nomades du désert. Il est l'auteur d'une chaine Youtube à succès avec près de 13000 abonnés. En voici la présentation :



La description du contenu de cette chaine est éloquente :

"Ma chaîne présente en majorité des vidéos enregistrées lors des festivals des nomades de M'Hamid el Ghizlane et du festival des amandiers de Tafraoute au Maroc (environ 300) avec l'accord des organisateurs et de la plupart des artistes.
Ces festivals rassemblent différents styles de musiques de pays différents. Chacun pourra ainsi y trouver peut-être ce qu'il cherche.
Classez les par les plus populaires afin d'avoir une idée correcte du contenu global.
Je vous souhaite de passer de bons moments devant vos écrans."

Concernant la chaîne youtube, voici l' url qui permet d'y accéder facilement :


http://www.youtube.com/c/BernardStienne


Le festival des nomades se déroule en principe en mars de chaque année à M'Hamid el Ghizlane aux portes du désert au sud de Zagora (Maroc) et à quelques km de la frontière algérienne. 
Ce festival est géré par Noureddine Bougrab, un instituteur du village, avec qui des relations amicales se sont établies.
Cette année encore, nous sommes allés le rencontrer afin de le soutenir car l'organisation du festival n'a pas été autorisée. 
Nombre de sponsors de cette manifestation se sont désistés et afin de l'aider à la mesure de nos petits moyens, je lui ai proposé de monétiser les vidéos du festival sur la chaîne. 
Le fruit de cette monétisation  reviendra en grande partie à l'association "nomades du monde". 
Les frais engendrés par cette manifestation sont loin d'être négligeables : podium, sono,  contacts, participation au transport des artistes et leur cachet, ..... Ne soyez donc pas trop surpris des "pubs" qui peuvent intervenir notamment au début de chaque titre, c'est pour une bonne cause..
L'accès au public à ce festival en plein air est totalement gratuit afin qu'il profite à un maximum de personnes. 
Noureddine, directeur de l'association "nomades du monde", cherche à amener des groupes de différents pays: Algérie, Mauritanie, Niger, Sénégal, Maroc, bien sûr et même Espagne, Pologne..... Le fil conducteur de ce rassemblement est le nomadisme, la fraternité...
Des animations, expositions, concours, activités sportives, courses de dromadaires et conférences complètent ces trois jours de partage.
On peut se faire une idée de l'esprit de ce festival en parcourant le site qui lui est dédié:
 
http://www.nomadsfestival.org/association-nomades-du-monde/
(ne pas être inquiété par le triangle "non sécurisé" devant l'url du site. Aucun problème !)
Je n'en dis pas plus sur notre coup de cœur et cette année l'appel du désert se fera sentir, mais la covid nous en privera..
Bien amicalement.
Bernard Stienne

Bernard Stienne (66 71) nous fait parvenir 4 exemplaires du journal Élan de 1966 1967 rédigé par une équipe mixte de normaliens et normaliennes

Le confinement a du bon.

En fouillant dans mes archives j'ai retrouvé quelques numéros du journal ELAN.



Ce numéro 1 de la nouvelle série associant les deux écoles normales doit être, sauf erreur, de 1966.
Ce sera peut-être un doublon, mais dans la négative je vous transmets  un pdf de la digitalisation de ce N°1.
Cela rappellera éventuellement des souvenirs à certains.
La lecture est parfois difficile, mais le journal était imprimé avec la technologie de l'époque...
Sur la couverture, vous pouvez trouver en surcharge "Angélique". C'était le surnom qui m'était donné en référence la chanson de Michel Orso bien connue cette année là !
Si cela intéresse, d'autres digitalisations peuvent suivre.
Bon confinement.  Bonne lecture.
Bernard Stienne  

Lien vers le journal Élan de 1966


Ont collaboré à ce numéro (repérés par leur signature) : 

PANTEGNIES G., DEGRAEVE, PACZKA, BOULANGER RENÉ, BRUNEL ALAIN, SALEUVE PATRICE, PENNEL PATRICE, ADAM YVES, DEJAEGHER, CATENNE, AUDANT, JURKOWSKI, POULAIN MICHEL, PATTE PATRICK, MASSON



Le numéro 2 vient ensuite  (même si ce n'est pas forcément l'ordre de parution)

D'abord la page de couverture, suivie du sommaire avec les noms des signataires des articles




Pour lire la suite cliquer sur le lien "ÉLAN N°2 ANNÉE 66 67"


Numérisation du n°3 d'ÉLAN de l'année 66 67

La qualité d'impression est ce qu'elle est et la lecture n'est pas toujours facile.

D'autres suivront.

Bien amicalement.

Bonne lecture à tous.



Pour lire le n°3 en entier, cliquer sur le lien

Voici pour terminer la série : ÉLAN N°4

Pour le découvrir en intégralité cliquer sur le lien 

Le 11 Novembre 2020 n'aura pas vu les anciens normaliens se recueillir devant le monument aux morts inauguré en 1923 à la mémoire de leurs aînés morts pour la France lors des deux guerres mondiales pour raison de pandémie.

 C'est l'occasion de rappeler les circonstances liées à l'inauguration de ce monument en 1923



Le Monument destiné à perpétuer, dans l'École Normale et dans la Ville de Douai, le souvenir des Instituteurs et des Élèves-Maîtres du Nord, Morts pour la France, a été inauguré le dimanche 13 Mai 1923.
Ce Monument symbolise "La Victoire". Sur cette œuvre, nous ne croyons mieux faire que de publier quelques notes parues en 1922.
" La statue, socle compris, mesure cinq mètres de hauteur. Placée dans le jardin qui borde l'Allée Parant, elle se détachera l'été sur un fond de verdure constituée par les arbres des jardins voisins ; sur le vieux mur vétuste, couronné de fleurs sauvages, devant lequel passèrent, joyeux, la plupart des trois cents héros qui vont être glorifiés, seront inscrits les noms des morts.
" L'œuvre est d'une grande allure, d'une admirable beauté de lignes, d'une incomparable vigueur de modelé. D'une sculpture peu banale, elle ne rappelle en rien les groupes construits en série et que l'on retrouve sur les places de maints villages. Elle est due à l'éminent sculpteur Pierre ROCHE et elle a été choisie par le talentueux artiste peintre douaisien DUHEM. Elle représente un lutteur, musculeux belluaire antique, aux prises avec un fauve, emblème du féroce teuton. "

M. CHARTON, Directeur de l'Ecole Normale, lançait à cette même époque un éloquent appel aux Instituteurs, aux Institutrices, aux amis de l'enseignement laïc pour la réalisation de cette œuvre de reconnaissance. Parlant du monument, il s'exprimait ainsi :
" Le Lutteur ! symbole éternel ! J'aime que ce déploiement de courage frappe les yeux du jeune homme qui entre à l'Ecole Normale. Il se peut, on le dit, et nous le croyons, et nous le souhaitons ardemment, que la guerre atroce disparaisse à jamais ! Mais il restera sans doute encore longtemps quelques fléaux terribles ; l'ignorance, le vice, la misère, sans compter les forces aveugles de la Nature... Ce n'est pas encore demain que sera rayée du catéchisme la liste des péchés capitaux ; contre tout cela, il faudra toujours lutter, et mieux on luttera, plus on sera un homme. N'est-il pas toujours vrai le mot du grand poète Goethe : " J'ai été un homme, ce qui signifie un lutteur ".
 
Sur le site de l'amicale de l'école normale d'instituteurs de Douai, vous pourrez prendre connaissance des discours qui ont été prononcés à cette occasion et des noms inscrits des Instituteurs et Elèves-Maîtres tués à l'ennemi, morts des suites de leurs blessures ou disparus ainsi que leur affectation au début du conflit avec les dates et lieux de leur décès. Voici le lien vers le site : cliquer ici


Il était une fois en 1834 la naissance de l'école normale primaire de Douai.

DE L'HISTOIRE UN PEU...


Un Conseil Royal du 14 décembre 1832 avait arrêté un règlement qui régissait les premières Écoles Normales créées par certains départements et ce, avant la Loi du 28 juin 1833 imposant à chaque département l'obligation d'entretenir une École Normale.

Le Département du Nord n'attendit pas le vote d'obligation de 1833. Son Conseil Général avait, quelques temps auparavant, décidé de la création d'une École Normale conjointement avec le département du Pas-de-Calais.

Dès le mois d'août 1833 les dépenses d'installation sont votées pour un montant de 8.500 F de l'époque.

Douai avait été choisi pour abriter l'École Normale du département du Nord parce qu'elle était le siège de l'Académie et que le Recteur, y résidant, pouvait surveiller plus aisément la nouvelle école ; de plus Douai était le véritable centre universitaire de la région, et aussi le centre géographique du département en restant tout proche du Pas-de-Calais.


DE 1834 À 1877


Définitivement organisée le 2 janvier 1834, c'est par délibération du 13 avril 1834 que la ville de Douai offre un local rue de la Charte (aujourd'hui rue Fortier).

Ouverte le 16 mai 1834, elle accueillit 31 élèves-maîtres pour une durée d'études de deux ans, la moitié des effectifs venant du Pas-de-Calais. Cette situation dura jusqu'en 1850, date de la création d'une École Normale à Arras

Après 12 ans d'occupation des locaux, notre École Normale fut enfin transférée le 1er octobre 1846 dans des bâtiments plus spacieux rue des Carmes (aujourd'hui rue V. Hugo).

Malgré la création de l'E.N. d'Arras, le nombre des élèves-maîtres ne changea pas. Au contraire l'effectif fut porté à 60 élèves-maîtres, la durée des études étant de trois ans dès 1851. Cette même année, on installa une école annexe d'une classe dans une partie des bâtiments contigus.

L'effectif de l'école passe à 77 élèves-maîtres en 1873. Petit à petit le maximum d'expansion et d'aménagements de l'École est atteint ; de plus, l’Inspecteur d'Académie demande que l'école puisse admettre 40 élèves-maîtres par promotion et 50 à l'avenir, portant ainsi à 150 élèves-maîtres l'effectif global. La construction d'une nouvelle École Normale s'impose. Le Préfet approuve la proposition et la soumet au Conseil Général qui vote le 28 octobre 1874 le principe de la construction.

La première pierre fut posée en août 1875 et l'École Normale ouvrit ses portes aux élèves-maîtres le 26 septembre 1877.




D’après le livret publié en 1984 pour le centenaire de l’école normale de Douai par Robert Pierre, membre de l’amicale des anciens élèves de l’École Normale d’Instituteurs.


Plus de détails sur l'architecture de ce bâtiment à sa naissance sur notre site internet (cliquer sur le lien bleu ou sur la photo ci-dessous) )



La façade principale donnait à l'époque sur la rue Albergotti et non sur la rue d'Arras comme de nos jours

L'exil de l'école normale d'Instituteurs de Douai à Granville dans la Manche


Alors qu'en 1914 rien n'avait été prévu en cas de guerre, en 1939, on avait organisé l'exode des deux Écoles Normales. C'est le 2 décembre 1939 qu'un train spécial emmena normaliens et normaliennes à Granville.

Les garçons s'installèrent au Grand-Hôtel alors que les cours étaient donnés dans diverses salles du Casino.

La formation « granvillaise » fut de courte durée ; l'avance rapide de l'ennemi força le Directeur à interrompre le cycle d'études le 8 juin 1940. livrant ainsi les normaliens aux vicissitudes d'un nouvel exode. 

Dès juillet 1940, les Écoles Normales étaient supprimées par le gouvernement de Vichy. Les élèves furent dispersés dans les lycées et collèges pour y préparer le baccalauréat.

Nous avons retrouvé le récit émouvant de cet exode par un témoin anonyme, sans doute un professeur ou un surveillant de l'époque dans le livre écrit en 1961 par André Canivez, ancien élève et ancien professeur de l'ENI et vous pouvez le lire sur le site de l'amicale des anciens normaliens de Douai (Cliquer sur ce lien )

Un siècle plus tôt, Victor Hugo avait séjourné au même "Grand Hôtel" et en avait fait un récit ainsi qu'un poème. C'est à découvrir sur le site de l'amicale 



Le nouveau site de l'Amicale des anciens normaliens de Douai s'enrichit

Il est possible désormais d'avoir sur la même page du site de l'amicale des anciens normaliens de Douai un lien vers les vidéos Youtube et Dailymotion, ainsi que vers le blog d'actualités, les 4 derniers bulletins (2017, 2018, 2019, 2020) à feuilleter librement. Il est facile aussi d'aller d'une page à l'autre en cliquant en haut et à droite vers l'Accueil, la page d'histoire ancienne, la page consacrée à l'oeuvre des nôtres
Bientôt une quatrième page consacrée aux
différents directeurs de l'école normale de Douai qui se sont succédé depuis la création en 1834. Pour cela, votre aide sera précieuse au travers des témoignages et anecdotes que vous pourrez nous faire remonter à propos des derniers en date : Mériaux, Clisant, Virel, Beaucarne et Mutelet. Vous avez forcément connu l'un d'eux... 

Merci par avance



 Il suffit pour cela de cliquer sur ce lien https://sites.google.com/view/engiufmdouai/accueil

Leçons de pédagogie par Albert Mathieu, directeur de l'école normale en 1908 et Edmond Blanguernon, professeur agrégé au Lycée de Douai



Ce manuel, de près de 500 pages, conforme aux instructions officielles du 4 août 1905, date de 1908 pour sa première édition. Il s'adressait aux élèves-maîtres et instituteurs pour les aider dans tous les domaines de leur métier. Son succès a été  tel qu'on ne compte pas moins de 12 rééditions jusqu'en 1937. Aujourd'hui, c'est un "collector" que l'on peut se procurer sur les librairies en ligne à des tarifs élevés, jusqu'à 80€...
Albert Mathieu, directeur de l'école normale de Douai en est le coauteur avec Edmond Blanguernon, professeur agrégé au lycée de Douai. Plus de détails  et de liens utiles sur le site de l'école normale de Douai à la page "L'oeuvre des nôtres"






Quand la place réservée à l'enseignement sur les colonies et les protectorats soulevait les passions en 1926 et qu'un directeur d'école normale de Douai s'en mêlait







Quand la France était encore un empire colonial, la place qu'il convenait d'accorder dans l'enseignement aux colonies et protectorats, telle était la polémique qui faisait rage en 1926. 


Henri Charton
, alors directeur de l'école normale primaire de Douai s'en est mêlé publiquement par voie de presse en réponse à un article très critique de l'ancien ministre des colonies, M.Messiny paru dans le journal "Le Temps. 

L'amicale des professeurs d'histoire et géographique a pris part à la polémique et développé ses arguments. Tout cela est à lire en détail avec les fac-similés d'époque et leur version texte sur le site amical  Cliquer ici (page 2 :  "De l'histoire ancienne"

Hommage à Samuel Paty : ce que dit la « Lettre aux instituteurs » de Jaurès


Lundi 2 novembre, au retour des vacances de la Toussaint, ce texte de Jean Jaurès entré dans le patrimoine républicain résonnera dans tous les établissements de France, en hommage à Samuel Paty, le professeur d’histoire-géographie victime d’une attaque terroriste à Conflans-Sainte-Honorine le 16 octobre. En voici le contenu.

(Denis Peiron, le 31/10/2020 à 16:44 Modifié le 01/11/2020 à 10:00 in La Croix)


Une statue de Jean Jaurès à Paris, le 24 novembre 1924.  AP

La lecture de la « Lettre aux instituteurs et aux institutrices » sera, avec la minute de silence, l’un des temps forts de l’hommage qui sera rendu dans tous les établissements de France, lundi 2 novembre, à Samuel Paty, le professeur d’histoire-géographie assassiné à la veille des vacances de la Toussaint dans un acte terroriste qui a ébranlé toute la communauté éducative.
Ce texte, signé par Jean Jaurès, avait déjà été intégré à la poignante cérémonie tenue à la Sorbonne quelques jours après le drame, pour honorer la mémoire de cet enseignant mort pour avoir fait étudier à ses élèves des caricatures représentant le prophète Mohammed.
Écrit dans un contexte de réformes inédites pour l’école, c’est d’abord dans les colonnes du quotidien toulousain La Dépêche que Jean Jaurès publie, en 1888, cette lettre, qu’il reprendra un an plus tard dans son ouvrage Action socialiste. Agrégé de philosophie et normalien, l’enfant d’Albi a enseigné un temps à l’École normale d’instituteurs, avant d’être chargé de cours à la faculté de Toulouse, puis de devenir le plus jeune député de France, en 1885.
À l’époque, l’école française vient de connaître des réformes inédites sous l’impulsion de Jules Ferry, à qui l’on doit notamment la loi de 1882 sur l’enseignement primaire obligatoire, précisée par une circulaire consacrée à « l’enseignement moral et civique ».

Attentat à Conflans : « Montrer aux enfants que, malgré la douleur, on a les moyens d’agir »

Dans ce contexte, Jean Jaurès, admiratif de Ferry, et reconnaissant à l’égard de cette école à laquelle il doit tant, rédige ce texte passé à la postérité. « Vous tenez en vos mains l’intelligence et l’âme des enfants ; vous êtes responsables de la patrie », exhorte-t-il.

Jaurès, devenu une figure consensuelle

Ce texte fait aujourd’hui partie intégrante du patrimoine républicain et renvoie à l’idée d’une école pleine de promesses, synonyme de lumière et d’élévation, de citoyenneté. Il est, de surcroît, l’œuvre d’une figure politique majeure de l’histoire, héraut du socialisme tombé sur l’autel de la paix, à la veille de la Première guerre mondiale. Une figure que des hommes et femmes de droite n’hésitent plus, désormais, à citer en exemple (Nicolas Sarkozy lui-même s’était aventuré à écrire une « Lettre aux enseignants » peu après son arrivée à l’Élysée en 2007).
Voici le texte intégral :

La lettre aux instituteurs et Institutrices, parue dans La Dépêche de Toulouse du 15 janvier 1888

« Vous tenez en vos mains l’intelligence et l’âme des enfants ; vous êtes responsables de la patrie. Les enfants qui vous sont confiés n’auront pas seulement à écrire, à déchiffrer une lettre, à lire une enseigne au coin d’une rue, à faire une addition et une multiplication. Ils sont Français et ils doivent connaître la France, sa géographie et son histoire : son corps et son âme. Ils seront citoyens et ils doivent savoir ce qu’est une démocratie libre, quels droits leur confère, quels devoirs leur impose la souveraineté de la nation.
Enfin ils seront hommes, et il faut qu’ils aient une idée de l’homme, il faut qu’ils sachent quelle est la racine de nos misères : l’égoïsme aux formes multiples ; quel est le principe de notre grandeur : la fermeté unie à la tendresse.
Il faut qu’ils puissent se représenter à grands traits l’espèce humaine domptant peu à peu les brutalités de la nature et les brutalités de l’instinct, et qu’ils démêlent les éléments principaux de cette œuvre extraordinaire qui s’appelle la civilisation. Il faut leur montrer la grandeur de la pensée ; il faut leur enseigner le respect et le culte de l’âme en éveillant en eux le sentiment de l’infini qui est notre joie, et aussi notre force, car c’est par lui que nous triompherons du mal, de l’obscurité et de la mort.

« Que toutes nos idées soient comme imprégnées d’enfance »

Eh ! Quoi ? Tout cela à des enfants ! Oui, tout cela, si vous ne voulez pas fabriquer simplement des machines à épeler… J’entends dire : « À quoi bon exiger tant de l’école ? Est-ce que la vie elle-même n’est pas une grande institutrice ? Est-ce que, par exemple, au contact d’une démocratie ardente, l’enfant devenu adulte, ne comprendra pas de lui-même les idées de travail, d’égalité, de justice, de dignité humaine qui sont la démocratie elle-même ? »
Je le veux bien, quoiqu’il y ait encore dans notre société, qu’on dit agitée, bien des épaisseurs dormantes où croupissent les esprits. Mais autre chose est de faire, tout d’abord, amitié avec la démocratie par l’intelligence ou par la passion. La vie peut mêler, dans l’âme de l’homme, à l’idée de justice tardivement éveillée, une saveur amère d’orgueil blessé ou de misère subie, un ressentiment ou une souffrance. Pourquoi ne pas offrir la justice à nos cœurs tout neufs ?
Il faut que toutes nos idées soient comme imprégnées d’enfance, c’est-à-dire de générosité pure et de sérénité. Comment donnerez-vous à l’école primaire l’éducation si haute que j’ai indiquée ? Il y a deux moyens. Tout d’abord que vous appreniez aux enfants à lire avec une facilité absolue, de telle sorte qu’ils ne puissent plus l’oublier de la vie, et que dans n’importe quel livre leur œil ne s’arrête à aucun obstacle. Savoir lire vraiment sans hésitation, comme nous lisons vous et moi, c’est la clef de tout…
Sachant bien lire, l’écolier, qui est très curieux, aurait bien vite, avec sept ou huit livres choisis, une idée très haute de l’histoire de l’espèce humaine, de la structure du monde, de l’histoire propre de la terre dans le monde, du rôle propre de la France dans l’humanité.

« Faire sentir à l’enfant l’effort inouï de la pensée humaine »

Le maître doit intervenir pour aider ce premier travail de l’esprit ; il n’est pas nécessaire qu’il dise beaucoup, qu’il fasse de longues leçons ; il suffit que tous les détails qu’il leur donnera concourent nettement à un tableau d’ensemble. De ce que l’on sait de l’homme primitif à l’homme d’aujourd’hui, quelle prodigieuse transformation !
Et comme il est aisé à l’instituteur, en quelques traits, de faire sentir à l’enfant l’effort inouï de la pensée humaine ! Seulement, pour cela, il faut que le maître lui-même soit tout pénétré de ce qu’il enseigne. Il ne faut pas qu’il récite le soir ce qu’il a appris le matin ; il faut, par exemple, qu’il se soit fait en silence une idée claire du ciel, du mouvement des astres ; il faut qu’il se soit émerveillé tout bas de l’esprit humain qui, trompé par les yeux a pris tout d’abord le ciel pour une voûte solide et basse, puis a deviné l’infini de l’espace et a suivi dans cet infini la route précise des planètes et des soleils ; alors, et alors seulement, lorsque par la lecture solitaire et la méditation, il sera tout plein d’une grande idée et tout éclairé intérieurement, il communiquera sans peine aux enfants, à la première occasion, la lumière et l’émotion de son esprit. Ah ! Sans doute, avec la fatigue écrasante de l’école, il est malaisé de vous ressaisir ; mais il suffit d’une demi-heure par jour pour maintenir la pensée à sa hauteur et pour ne pas verser dans l’ornière du métier.

« Vous pouvez tout doucement les mener au bout du monde »

Vous serez plus que payés de votre peine, car vous sentirez la vie de l’intelligence s’éveiller autour de vous. Il ne faut pas croire que ce soit proportionner l’enseignement aux enfants que de le rapetisser. Les enfants ont une curiosité illimitée, et vous pouvez tout doucement les mener au bout du monde.
Il y a un fait que les philosophes expliquent différemment suivant les systèmes, mais qui est indéniable : « Les enfants ont en eux des germes de commencements d’idées. » Voyez avec quelle facilité ils distinguent le bien du mal, touchant ainsi aux deux pôles du monde ; leur âme recèle des trésors à fleur de terre ; il suffit de gratter un peu pour les mettre à jour. Il ne faut donc pas craindre de leur parler avec sérieux, simplicité et grandeur.
Je dis donc aux maîtres pour me résumer : lorsque d’une part vous aurez appris aux enfants à lire à fond, et lorsque, d’autre part, en quelques causeries familières et graves, vous leur aurez parlé des grandes choses qui intéressent la pensée et la conscience humaine, vous aurez fait sans peine en quelques années œuvre complète d’éducateurs.
Dans chaque intelligence il y aura un sommet, et, ce jour-là, bien des choses changeront. »

Jean Jaurès

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