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dimanche 24 octobre 2021

Mai 68 à l'école normale d'instituteurs de Douai, un témoignage inédit de Monsieur Virel, directeur de l'établissement de 1967 à 1976

 

Le matin du lundi 13 mai, sous l’impulsion des syndicats (CGT, CFDT, FO et FEN), des lycéens et des étudiants des Écoles normales, un meeting est organisé à l’Hippodrome à l’issue duquel un cortège de 1 200 manifestants défile dans le centre-ville de Douai.


Il y a eu la publication ici-même en 2020 d'un appel de Marc Delmotte (63 67) à se souvenir des événements de mai 68 tels qu'ils se sont déroulés à l'ENG

( cliquer sur le lien ci-après pour retrouver cet article du blog : https://engiufmdouai.blogspot.com/search?q=mai+68 )

Voici donc pour mémoire ce qu'écrivait Marc Delmotte :

"Bonjour les amis
Hier soir, j"avais René Boulanger (65-70) et Jacques David (63-68) chez moi à Carcassonne et bien sûr nous avons évoqué nos souvenirs de notre passage à l'EN de Douai. C'est ainsi que j'ai appris par eux qu'en mai 68, alors que je pensais que l'EN était complètement fermée à cause des "événements", un groupe d'une vingtaine d'élèves, dont eux deux, encadrés par quelques profs (dont Haremza, Hage et Bouboule - excusez moi mais j'ai oublié son nom... que je n'ai peut-être jamais connu !) - était resté à l'intérieur de l'établissement pour protéger l'EN et empêcher d'éventuelles dégradations qu'auraient été tentés de faire des élèves du lycée de Douai. Cette "occupation a duré un certain temps.
La porte entre l'ENG et l'ENF avait été ouverte... Bouboule s'occupait de la cuisine ! Ensuite, leurs souvenirs sont confus.

J'ai pensé que cet "épisode" méritait d'être approfondi (recherche d'autres témoignages, article dans le prochain bulletin ...) c'est pourquoi je vous "renvoie la balle". Qu'en pensez-vous ?"

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C'est en feuilletant un ancien bulletin de l'amicale des anciens élèves de l'école normale de Douai (n°63, octobre 1976) que nous avons découvert ce témoignage inédit de Monsieur Virel, à l'occasion de la cérémonie organisée en son honneur pour son départ en retraite. Dans son discours de remerciement, il évoque mai 68 et son témoignage complète fort justement celui de René Boulanger (65 70) et de Serge David (63 68). Voici cet extrait sur les événements qu'il a vécus en tant que directeur : 


"Quand j'ai pris la direction de cet établissement (en 1967 NDLR), les nouvelles constructions entreprises par mon prédécesseur et ami M.  MERIAUX (M. l'Inspecteur d'Académie MERIAUX) étaient achevées, il ne restait plus qu'à ouvrir largement l'Ecole Normale sur la rue d'Arras, c'était le troisième plan des travaux en cours.

Je me suis demandé alors ce que je pouvais bien faire désormais de nouveau puisque tout était parfait. Il ne me restait plus qu'à chausser les bottes de mes illustres prédécesseurs et à essayer de faire aussi bien qu'eux, pensai-je.

Vint mai 1968 ! Il y eut des semaines chaudes dans nos deux Écoles Normales. Mais même quand tout semblait aller au naufrage je dois rendre hommage à la probité intellectuelle des professeurs et à un fond de conscience morale des élèves-maîtres qui m'ont permis d'abord de garder le contact avec eux et une certaine autorité puis, grâce à M. HAREMZA et à Mlle COLIN en particulier de voir se terminer dans l'ordre et le respect de la propreté des bâtiments cette grave crise. Après un moment de surprise, les élèves-maîtres eux-mêmes organisèrent un service de nuit pour empêcher toute intrusion d'éléments perturbateurs ou étrangers à leurs problèmes. La concertation restait à l'Ecole Normale.

En définitive cette manifestation fut bénéfique à tous en ce sens qu'elle a fait apparaître des vestiges de notre vieille institution. Elle nous a obligés à nous repenser et à modifier notre façon d'être. Il reste à nos jeunes gens à faire l'apprentissage de la liberté, et de la responsabilité, à prendre en mains leur destinée en n'oubliant pas qu'ils sont de futurs éducateurs et, comme tels, responsables de la société à venir."

Jean Haremza

Mlle Jeanne Colin, à droite sur la photo


Pour découvrir la biographie complète de Monsieur Virel, cliquer sur ce lien sur le site internet, rubrique : les directeurs

mercredi 18 décembre 2019

Un récit émouvant de Jacques Devienne autour d'une solide amitié normalienne et d'un souvenir plein de mystères à propos de Stonehenge

DOUAI-STONEHENGE ALLER ET RETOUR

OU L'HISTOIRE D'UN SITE ET D'UNE BELLE AMITIE

JUIN 1967

Pour passer le concours d'entrée à l'école normale nous devions être "internés" pendant quelques jours. Entre les épreuves orales, de nombreux candidats se promenaient dans le parc en essayant de glaner quelques renseignements sur le type de questions posées par les jurys. Je m'approche d'un garçon assis sur un banc et, après de rapides présentations, il me pose la question : "il paraît que des examinateurs de mathématiques demandent de calculer la surface d'une rosace, tu sais faire ça toi ?". Panique... je ne pense pas avoir appris cette formule, nous retournons le problème dans tous les sens en essayant d'accéder au tréfonds de notre mémoire et notre angoisse s'intensifie car nous savons qu'une partie de notre avenir est en train de se jouer.
Proclamation des résultats : nous sommes tout à la joie d'être devenus des Normaliens ! 

SEPTEMBRE 1967

Rentrée des classes, je suis en seconde A et je retrouve le "garçon à la rosace", Bernard, avec qui je fais plus ample connaissance et deviens ami. Le premier texte que nous étudions en cours d'anglais s'intitule "Stonehenge" et manifestement notre professeur, Mademoiselle Colin, apprécie beaucoup ce site mégalithique ; elle nous en parle avec enthousiasme , nous montre des cartes postales, en construit une réplique avec des craies sur le bureau, et nous passons du temps sur ce texte, beaucoup de temps... Les adolescents insouciants que nous sommes plaisantent volontiers mais nous ne sommes pas insensibles à la musicalité de la langue anglaise :"Inexpressibly remote those great stones seemed, standing up in the faint light..." 
Le temps passe et l'année scolaire se termine par les fameux événements de mai 68. 


extrait du livre d'anglais de la classe de seconde L GUITARD et L.MARANDET


AOÛT 1968

Bernard, devenu mon meilleur ami, me téléphone et me demande si cela me plairait de passer des vacances en Angleterre, nous ferons du stop et logerons en auberge de jeunesse. L'idée est séduisante mais je m'inquiète un peu des conditions de vie durant ce séjour. Il me dit : "Et naturellement nous irons ... à Stonehenge !" Nous voilà partis avec le sac au dos, nous vivons bien des aventures avant d'arriver dans la plaine de Salisbury. Nous allons pouvoir confronter les représentations imaginaires avec la réalité. Pour ma part je ne suis pas déçu et je retrouve l'ambiance du texte d'Henry Vollam Morton : " A une distance inexprimable ces grandes pierres semblaient se tenir debout dans la faible lumière qui n'était ni celle de la lune ni celle du soleil mais la demi lumière spectrale qui se présente avant le jour. "

MAI 2018

50 ans plus tard je reste fasciné par les mystères qui entourent ce site : de nombreuses théories ont été émises pour répondre aux questions : comment ces pierres ont-elles été transportées ? comment ont-elles été dressées ? quelle était la fonction de cet endroit ? une sorte de calendrier astronomique ?  s'y est-il produit des sacrifices humains ? ... 
Le temps passe encore jusqu'au jour où, à l'occasion d'un séjour à Londres, je découvre un livre de Rosemary HILL sur Stonehenge et la photo de couverture fait remonter bien des souvenirs. En le feuilletant je tombe en arrêt  devant cette phrase : " ...while a fifteenth-century drawing discovered recently in Douai in France ... " Ainsi l'une des représentations les plus anciennes des mégalithes de Stonehenge (1440-41) aurait été découverte à Douai. 

OCTOBRE 2019

Je mène mon enquête et j'apprends que ce manuscrit est conservé à la bibliothèque, à deux pas de l'ancienne école normale, et à l'occasion d'une réunion du conseil d'administration de notre amicale, je m'y rends.  Je suis reçu très courtoisement par Monsieur Jean Vilbas, conservateur de la bibliothèque de Douai, qui me décrit comment ce dessin a été découvert et m'explique qu'il s'agit d'une des plus anciennes représentations du site, peut-être la plus ancienne ("jusqu'au moment où on en trouvera une plus ancienne" me précise-t-il). J'ai eu le privilège, grâce à lui, de voir ce manuscrit anglais avec l'illustration qui est beaucoup plus petite que je ne l'imaginais (quelques centimètres carrés).  


 extrait du livre Stonehenge de Rosemary HILL

EPILOGUE

Cette boucle temporairement refermée entre Douai et Stonehenge suscite en moi un trouble certain, elle contient des souvenirs, de la nostalgie, une fascination pour les énigmes de l'histoire... mais surtout une grande et belle histoire d'amitié qui dure encore. Bernard (Moreau) et moi avons été dans la même classe pendant trois ans à Douai, puis nous nous sommes retrouvés au centre PEGC de Lille, il est aujourd'hui à la retraite après une carrière mouvementée et très riche, il vit à San Francisco où il a été directeur d'une école franco-américaine. 


Bernard Moreau

Jacques Devienne