La première pierre de l’École normale de Douai rue d'Arras a été posée il y a 150 ans. Toute une histoire... Jean Dujardin, le doyen des anciens normaliens de Douai raconte son vécu

 

Comment Jean Dujardin, fils d’ouvrier, s’est bâti une carrière d’instituteur, en entrant à l’École normale de Douai

Le 30 mars, l’Amicale des Anciens élèves de l’École normale de Douai va célébrer les 150 ans de la pose de la première pierre de cette vénérable institution. Doyen de l’assemblée, l’ancien normalien Jean Dujardin, 93 ans, égraine ses souvenirs.

Robuste comme un chêne, Jean Dujardin, 93 ans, se porte comme un charme. « Quand je tonds la pelouse, je me ménage quand même deux ou trois pauses », avoue-t-il, avant de rembobiner le film de sa carrière d’enseignant, avec pédagogie et le sens de la formule. Une carrière loin d’être toute tracée pour ce fils d’ouvrier.

« Entre à l’École normale, c’est gratuit », lui intime Maurice, son père. Simple ouvrier, il n’avait pas les moyens de payer à son fils les études d’architecte dont il rêvait. Bac en poche, le jeune homme intègre l’École normale en 1948. Commencent alors quatre ans d’études dans des conditions draconiennes. Chemise cravate de rigueur et lever à 6 heures pour les corvées de ménage. Il se souvient : « En automne, les camarades affectés au ramassage des feuilles tombées des arbres ne rigolaient pas ! » Puis il enchaînait les cours, jusqu’à l’extinction des feux à 22 heures.



Faire le mur pour retrouver une copine

Malgré tout, les jeunes garçons savaient se trouver des distractions. À côté, il y avait l’école des filles. « Pour la Saint-Nicolas, on recevait les filles pour un repas et un bal. À mi-février, nous fêtions la sainte-moitié (!), c’est-à-dire la moitié de l’année scolaire », raconte Jean Dujardin, le sourire aux lèvres en évoquant des camarades faisant le mur pour aller retrouver une copine. Des militaires logés dans la caserne voisine faisaient de même. Un jour, le mur d’enceinte a été rehaussé d’un grillage de façon à empêcher toute tentative « d’invasion ».


Titulaire du certificat de fin d’études normales (CFEN), sixième de sa promotion sur 80 diplômés, Jean Dujardin est nommé pour enseigner à l’école de la Sucrerie à Sin-le-Noble. Il est aujourd’hui le doyen de l’amicale des anciens élèves de l’école normale de Douai*.

Des cahiers de vacances fait-maison

Après deux ans d’armée, il rejoint le groupe scolaire Notre-Dame, à Waziers, avant d’être promu maître-formateur à l’école Painlevé, à Douai. De 1959 à 1967, il apprend aux stagiaires normaliens comment gérer une classe unique à trois niveaux, puis reprend en main une classe de CM1 jusqu’en 1987, l’année de sa retraite. Jean Dujardin rédigeait lui-même les cahiers de devoirs de vacances de chacun de ses élèves pour les « préparer à la classe supérieure ».


Au-delà de son travail, l’instituteur était passionné de voyages. « Avec mon épouse, nous avons accompli sept ou huit fois le tour du monde et arpenté une quarantaine de pays. » Passionné de peinture, il se définit « plus barbouilleur qu’artiste », devant ses paysages fleuris. Comme la barbe de Charlemagne, l’inventeur de l’école !

*L’amicale, présidée par Michel Bonfils et Jacques Devienne, vice-président, organise une exposition pour les 150 ans de l’École Normale. À partir du 30 mars, 14 panneaux retraçant l’histoire de l’École normale d’instituteurs de Douai seront accrochés sur les grilles du Lycée Edgar-Morin, rue d’Arras.


À l’École normale de Douai, il y a des étudiants depuis 150 ans

Par Nello Benedetti (correspondant local de presse)
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1875, pose de la première pierre

Les Écoles normales d’instituteurs* ont été créées en 1789, pendant la Révolution française. À Douai, l’établissement occupe d’abord des locaux situés rue Fortier (à l’époque rue de la Charte). Douze ans après, l’enseignement est transféré dans des bâtiments plus spacieux, rue des Carmes (aujourd’hui rue Victor-Hugo). La première pierre de l’édifice actuel, à l’extrémité de la rue d’Arras, entre les remparts et le jardin des Plantes, a été posée le 9 août 1875.

1990, création de l’IUFM

Le 26 septembre 1877, c’est la rentrée de la première promotion des futurs maîtres. L’école fermera en 1990, remplacée par l’Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM).

2010, le lycée d’excellence Edgar-Morin

Depuis 2010, fini la formation des maîtres, le site est occupé par le lycée d’excellence Edgar-Morin, qui accueille 150 élèves au parcours scolaire compliqué. Ils bénéficient d’un accompagnement individualisé ainsi que plusieurs ateliers autour du théâtre, avec le Tandem et le conservatoire à rayonnement régional, de la justice, avec la Cour d’appel de Douai, ou du monde maritime.

*Normale signifie ici qui doit servir de règle et de modèle.


Voici l'article paru dans la Voix Du Nord du 26 mars 2025, édition de Douai



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