Quelques souvenirs de la cérémonie d'inauguration du Monument aux Morts (cérémonie du 13 mai 1923)
carte postale d'époque 1923 |
Verso de la carte postale avec son descriptif : "Monument exécuté en 1921 par le sculpteur Pierre Roche, de son vrai nom Fernand Massignon (Paris 1855 1922) |
L'inauguration du Monument a eu lieu le dimanche 13 Mai 1923 à 11 h. 30, à l'École Normale d'Instituteurs de Douai.
Par suite d'un temps déplorable, la cérémonie officielle qui devait avoir lieu au pied du Monument, dans l'Avenue Parant, s'est déroulée dans l'ancienne chapelle de l'École, trop exiguë pour contenir la foule nombreuse des autorités civiles et militaires, des parents et amis des héros morts pour la France.
M.LAPIE, Directeur de l'Enseignement primaire, délégué du Ministre de l'Instruction Publique et des Beaux-Arts, présidait la cérémonie. Étaient à ses côtés : M. DANIEL-VINCENT, député, ancien ministre ; MM. HAYEZ sénateur du Nord, ESCOFFIER, GONIAUX, LEMIRE, députés ; le Général GASCOUIN ; MM. le Premier Président de la Cour d'Appel, le Procureur général, le Procureur de la République ; M. HÉNIN, Consul de Belgique ; M. GODIN, Maire de Douai ainsi que le Conseil Municipal ; M. LYON; Recteur ; M. CAPRA, Directeur départemental de l'Enseignement primaire ; M. BERNEUIL, inspecteur primaire honoraire ; M. MATHIEU, ancien Directeur de l'E.N. ; M. CHARTON, Directeur de l'E.N. ; Mme EIDENSCHENK, Directrice de l'Ecole Normale d'Institutrices ; M. DUTOIT, Directeur de l'École annexe ; MM. PARENTY, Président, WARLOP, Vice-Président de " l'Association des Poilus " ; SCREVE, Président de l' " Association des Mutilés " ; CANIVEZ, Directeur du Centre de Rééducation des Mutilés ; Messieurs les Officiers de la Garnison, de la Compagnie des Sapeurs Pompiers, etc...
Après l'exécution de la " Marseillaise " par le chœur des Élèves-Maîtres, M. ANDRIEU, Instituteur à l'École Annexe, Vice-Président du Groupement des Mutilés, Chevalier de la Légion d'Honneur, fait l'appel tragique des 325 noms glorieux, auquel répond l'émouvant " Mort au Champ d'Honneur " que toute l'assistance émue et recueillie écoute debout.
Puis M. CHARTON, Directeur de l'E.N. rappelle l'héroïsme des Élèves-Maîtres tombés au cours de la guerre et dont le monument évoque si bien la vaillance toute française et le désir de vaincre.
La chorale des Élèves-Maîtres exécute alors " l'Hymne aux Morts " de Victor Hugo, sous la direction de M. GILLET.
Ensuite, M. DEGREMONT, parlant au nom des Instituteurs, rappelle que c'est un instituteur, le caporal PEUGEOT, qui versa le premier son sang pour la patrie, et exalte " les vertus des innombrables héros tombés pour la plus noble et la plus sainte des causes ".
M. CAILLERET, au nom des Universitaires Anciens Combattants, demande que le sacrifice de ces glorieux morts ne soit pas inutile "Ils sont légion, dit-il ; sur 28.300 membres de l'enseignement mobilisés, 7.000 sont morts, 10.000 ont été blessés. Il ne faut pas que leur sang ait été versé en pure perte, mais que, tirant leçon de leur sublime sacrifice, nous portions bien haut le drapeau qu'ils ont si bravement défendu ".
Prenant la parole à son tour, M. le Général GASCOUIN apporte aux Morts le salut de l'Armée ; il cite les batailles où se sont distingués les instituteurs du Nord, presque tous chefs de section d'infanterie.
"Ils savaient qu'en acceptant ce poste périlleux entre tous, ils avaient une chance de plus de ne pas revenir. Ils l'ont fait toutefois bravement, courageusement, et beaucoup sont restés sur le champ de bataille".
M. DUHEM, grand peintre douaisien, associe pieusement la mémoire de l'artiste génial qui a conçu le monument, M. ROCHE, à celle des héros dont il symbolise le courage et la force virile.
M. DANIEL-VINCENT, député du Nord, ancien Ministre, ancien Professeur à I'E.N., met en opposition, d'une voix vibrante, dans un remarquable discours, la force brutale de l'agresseur, la force du nombre, avec l'énergie que nous avons puisée, aux jours difficiles, dans notre haute culture morale.
M. LAPIE, parlant au nom de M. le Ministre de l'Instruction publique, clôture la série des discours, tous empreints du plus pur patriotisme. Il fait l'éloge des instituteurs du Nord morts pour la Patrie, et de ceux qui ont fait plus que leur devoir au milieu des tristesses de l'invasion. Il tire de ces sacrifices obscurs une sublime leçon pour ceux qui restent, pour ceux qui doivent, en temps de paix, continuer la tâche entreprise par leurs aînés pendant la guerre.
La chorale des Élèves-Maîtres termine par un chœur de BERLIOZ célébrant l'héroïsme des glorieux disparus qui sont maintenant à l'honneur, et l'assistance se retire profondément émue.
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Le 8 mai 1960, le monument aux morts a quitté l'allée Parant, pour être déplacé dans la Cour d'honneur face à la perspective donnant sur la rue d'Arras. |
Le Monument destiné à perpétuer, dans l'École Normale et dans la Ville de Douai, le souvenir des Instituteurs et des Élèves-Maîtres du Nord, Morts pour la France, a été inauguré le dimanche 13 Mai 1923. Ce Monument symbolise "La Victoire". Sur cette œuvre, nous ne croyons mieux faire que de publier quelques notes parues en 1922. " La statue, socle compris, mesure cinq mètres de hauteur. Placée dans le jardin qui borde l'Allée Parant, elle se détachera l'été sur un fond de verdure constituée par les arbres des jardins voisins ; sur le vieux mur vétuste, couronné de fleurs sauvages, devant lequel passèrent, joyeux, la plupart des trois cents héros qui vont être glorifiés, seront inscrits les noms des morts. " L'œuvre est d'une grande allure, d'une admirable beauté de lignes, d'une incomparable vigueur de modelé. D'une sculpture peu banale, elle ne rappelle en rien les groupes construits en série et que l'on retrouve sur les places de maints villages. Elle est due à l'éminent sculpteur Pierre ROCHE (cliquer pour sa biographie) et elle a été choisie par le talentueux artiste peintre douaisien DUHEM. Elle représente un lutteur, musculeux belluaire antique, aux prises avec un fauve, emblème du féroce teuton. " M. CHARTON, Directeur de l'École Normale, lançait à cette même époque un éloquent appel aux Instituteurs, aux Institutrices, aux amis de l'enseignement laïc pour la réalisation de cette œuvre de reconnaissance. Parlant du monument, il s'exprimait ainsi : " Le Lutteur ! symbole éternel ! J'aime que ce déploiement de courage frappe les yeux du jeune homme qui entre à l'Ecole Normale. Il se peut, on le dit, et nous le croyons, et nous le souhaitons ardemment, que la guerre atroce disparaisse à jamais ! Mais il restera sans doute encore longtemps quelques fléaux terribles ; l'ignorance, le vice, la misère, sans compter les forces aveugles de la Nature... Ce n'est pas encore demain que sera rayée du catéchisme la liste des péchés capitaux ; contre tout cela, il faudra toujours lutter, et mieux on luttera, plus on sera un homme. N'est-il pas toujours vrai le mot du grand poète Goethe : " J'ai été un homme, ce qui signifie un lutteur ".
C'est curieux...la carte postale avec Hercule est marquée "Ecole Nationale d'Instituteurs"...
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