"Qu’aurait été le déroulement de mon existence s’il n’y avait pas eu deux tables de tennis de table au ciroir de l’Ecole Normale d’Instituteurs de Douai ?" par Bernard Coget (promo 61 65)

De l’impact du «ciroir» de l’ENG dans le déroulement de ma vie.



Bernard COGET (promotion 1961-1965).


J’ai hésité à écrire ce texte qui relève à la fois de la vie à l'École Normale mais aussi pour une part importante de ma vie privée. C’est finalement Stéphan MARCINKOWSKI qui m’a convaincu de le faire. Il faut prendre ce récit comme anecdotique et je ne doute pas que le parcours de vie de nombreux camarades soit aussi marqué d’événements vécus lors de leur passage à l’ENG.


En préalable, la découverte du sport à l’ENG.


Le sport au «cours complémentaire»


Dans les années 60, peu de «cours complémentaires» assuraient la pratique de l’éducation physique et quand c’était le cas, l’encadrement n’était pas composé de professeurs d’éducation physique. 

Aux «cours complémentaires» d’Aniche, l’initiation au sport reposait sur quelques bonnes volontés locales : un encadrant du club de volley-ball et un autre du club de gymnastique.

Les séances, intégrées dans l’emploi du temps, comportaient certes quelques fondamentaux comme les courses, la préparation aux épreuves de fin de troisième, en particulier celles du concours d’entrée à l’Ecole Normale, mais s’organisaient essentiellement autour de la pratique du volley-ball et de la gymnastique.

Par ailleurs, il n’est pas inutile de préciser, que de nombreuses fois, alors que la classe traversait la longue cour de l’établissement scolaire pour sortir de l’établissement et se rendre au stade de football ou à la salle de gymnastique, le directeur, également professeur de mathématiques dans la classe spécifique de préparation au concours d’entrée à l’Ecole Normale, nous récupérait et nous profitions d’une heure supplémentaire de mathématiques !...

S’appuyer sur l’attrait du sport chez les élèves pour en faire un outil éducatif et donner à tous les jeunes les moyens de développer au maximum leurs possibilités était un concept globalement à peine germé.

Par ailleurs en ce qui me concerne, la pratique sportive ne faisait pas partie de mon environnement socio culturel et me considérant comme peu doué, j’y étais très moyen et peu enclin.


Le sport à l’ENG.


Mes camarades et moi découvrons vite que ce concept globalement naissant est déjà en pratique à l’Ecole normale, appliqué par les professeurs d’éducation physique : Georges HAGE, Jean JOLY, Jean MONARD.

Nous bénéficions du «droit au sport et au plein air pour tous» et les futurs enseignants que nous sommes se sensibilisent à cet état d’esprit pour application dans leur pratique professionnelle future.

L’éducation physique s’inscrit avant tout dans la volonté de permettre à tous les élèves de ne plus être «victimes de leur capital génétique et socioculturel» sans pour autant négliger la performance.

Mes progrès furent significatifs dans plusieurs domaines : courses de vitesse et de fond, pratique des sports collectifs, en particulier le volley-ball et un peu de rugby.

L’amélioration des capacités de chacun était une culture intégrée et l’élève gardait une part de responsabilité dans le choix des activités : je me souviens parfaitement de la possibilité que nous laissait Jean JOLY, lors de certaines séances d’EPS, de choisir ce que nous voulions faire. Souvent, j’optais pour un long footing, cumulant les tours de piste durant une heure. J’ai poursuivi durant ma vie la pratique de cet effort solitaire et la bonne capacité cardio-vasculaire dont je dispose encore actuellement en est le bénéfice.

Le cumul des performances individuelles, chacun dans la volonté de faire le mieux possible, aboutissait à la performance collective. Les bons résultats en athlétisme, en sports collectifs, Handball et rugby en particulier en témoignent. On peut évoquer également la victoire de l’ENG, chaque année au cross du nombre de Wagnonville même s’il est vrai que l’obligation de participation aidait largement au résultat.


Du «ciroir» de l’ENG à la pratique du tennis de table en compétition.


Au sous-sol de l’aile gauche des bâtiments de l’ENG, se trouvaient les casiers individuels où nous stockions nos paires de chaussures, le matériel et les produits pour les entretenir.

Dans ce sous-sol, ainsi appelé «ciroir», deux tables de tennis de table étaient installées, libre d’accès. Quelques normaliens s’y retrouvaient à chaque moment de libre pour échanger quelques balles et plus longuement le jeudi après-midi.

J’étais de ceux-là et j’eus le privilège d’y côtoyer d’excellents joueurs comme Marcel DEJARDIN (parmi les meilleurs Flandriens de l’époque) et Yannick DUFOUR excellent joueur.

La qualité de leur jeu renforça le plaisir que je prenais à jouer. Je me procurai rapidement une raquette de bonne qualité pour succéder à mon premier matériel, trop basique.

Largement dépassé par le niveau de jeu de Marcel et Yannick, je m’évertuais au cours des mois, des années à grignoter de plus en plus de points à mes deux principaux adversaires, supplantant par ailleurs d’autres camarades dont le niveau de pratique de départ était équivalent au mien.

Cette période de l’ENG me vit rejoindre le club de tennis de table d’Aniche et pratiquer la compétition au niveau départemental.

Je quittais l’ENG, largement ouvert à la pratique sportive et touché par le virus du tennis de table.


Du joueur de tennis de table à l’entraîneur et au dirigeant d’association.


Durant la seconde partie des années 60, ma progression me permit d’atteindre le niveau régional en compétition. Au retour du service militaire, le rapport de force s’était inversé avec les meilleurs de mes camarades des débuts au ciroir de l’ENG.

C’est incontestablement les années 1970 qui virent mes meilleurs résultats (place de demi-finaliste au championnat des Flandres, joueur de nationale 2 au club de Somain, vainqueur de tournois régionaux).

Rejoignant le club de Douai, j’eus souvent l’occasion de rencontrer Jean JOLY et d’échanger avec lui.

Cette période fut celle également où je passais mes diplômes d’entraîneur, assurant ensuite l’entraînement des nationaux au club, encadrant des stages départementaux et régionaux, prenant successivement la responsabilité des commissions techniques départementale et régionale.

Enfin, la rencontre avec le directeur national du tennis de table français et ma collaboration avec lui, alors qu’il occupait successivement les postes de Directeur technique national en Suisse et en Allemagne me permirent d’améliorer mes compétences d’entraîneur.

Le virus du tennis de table contaminant le reste de la famille, mon épouse ouvrait un commerce de matériel de tennis de table en 1977 et mon jeune fils commençait son initiation.


Les années 80 et 90 : des évolutions, mais le sport tennis de table reste un moteur de la vie familiale et même professionnelle.


Pour éviter toute confusion entre le commerce et mes fonctions de dirigeant régional, je démissionne du comité directeur de la Ligue.

Mon fils poursuit sa progression, se place parmi les meilleurs de sa génération, rejoint le « pôle France » tennis de table au CREPS de Wattignies. Dès lors, j’arrête de m’entraîner et de jouer pour lui consacrer mon temps.

J’assure la préparation et l’entraînement des joueurs de Nationales 1 et 2 du club de Bruille-Lez-Marchiennes.

J’interviens sur certaine séances d’entraînement du pôle France tennis de table et participe à la formation des Brevets d’Etat tennis de table au CREPS de Wattignies.

J’ai l’occasion de côtoyer de nouveau Marcel DEJARDIN devenu conseiller technique régional du tennis de table.

J’encadre la pratique du sport universitaire tennis de table à l’Ecole d’Ingénieurs des Mines de Douai.

Ma fille, d’abord salariée dans l’affaire commerciale de mon épouse, devient secrétaire administrative et comptable du Comité départemental du Nord de tennis de table, poste qu’elle occupe encore.

Mon fils poursuit sa carrière sportive et évolue en Nationale 1 à Proville puis à Bruille-les-Marchiennes.

Ainsi notre vie familiale et professionnelle est largement rythmée par le tennis de table.


Une période d’éloignement du monde du tennis de table.


D’un commun accord, le 31 décembre 1999, mon épouse cesse son activité commerciale et j’arrête d’entraîner pour vivre de nouvelles aventures associatives. Mes contacts avec le monde du tennis de table deviennent rares jusque la fin des années 2000.


Le retour à la compétition à la fin des années 2000.


Mon fils abandonne la compétition au niveau national et le temps d’entraînement qu’elle exigeait pour accompagner ses enfants dans leur parcours sportifs. 

Il me suggère de reprendre la compétition. J’accepte, reprends la compétition au niveau départemental et j’ai la joie depuis un an et demi de jouer dans la même équipe que le plus jeune de mes petits fils.

Par ailleurs, en compétitions individuelles, dans ma catégorie vétérans 4 (plus de 70 ans), j’engrange quelques réussites : champion des Hauts de France en 2017, troisième en 2018. Au championnat de France 2018, en catégorie vétéran 4, j’obtiens une médaille de bronze en double messieurs et en simples messieurs. 

Oublions le sursaut de vanité qui précède et retenons surtout que ma pratique sportive m’aide à conserver, avec l’aide des deux ou trois cachets, la meilleure santé possible.


En conclusion.


Indubitablement, le goût pris de la pratique sportive à l’ENG, le ciroir de l’ENG ou plus précisément l’existence des deux tables de tennis de table dans ce lieu, l’opportunité de la présence de camarades très bons pratiquants ont déclenché un processus qui a marqué le déroulement de ma vie.

Au crépuscule de ma vie, une question que je me pose et qui restera sans réponse est celle-ci : qu’aurait été le déroulement de mon existence s’il n’y avait pas eu deux tables de tennis de table au ciroir de l’Ecole Normale d’Instituteurs de Douai ?

Espérant que ce regard en arrière, très personnel, ne vous aura pas trop importuné et qu’il suscitera chez certains d’entre vous une démarche identique.


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