Joël Delplanque aurait pu devenir mineur. La vie, la volonté de ses parents et la sienne l’ont guidé vers d’autres horizons.
C'est dans le Nord, à Dechy dans la banlieue de Douai, que Joël Delplanque a grandi. « Je suis issu d'un milieu extrêmement modeste ». Pour de nombreux jeunes de l'époque, l'horizon, ce sont les terrils, et l'avenir c'est la mine. Mais les parents Delplanque veulent mieux pour leurs enfants. « C'est la première chose que j'ai toujours entendue : "faut pas que tu ailles à la mine". »
L'une des issues pour échapper au fond et à la silicose, c'est à Douai qu'elle se trouve : l'École Normale. « Pour des jeunes de mon milieu et de ma génération, rentrer à l'École Normale, c'était un objectif important parce qu'on était pris en charge économiquement. Et pour mes parents qui étaient ouvriers mineurs, il est clair que c'était une fierté. » À l'époque, on intègre le prestigieux établissement sur concours à l'issue de la 3 e. On y entre pour quatre années de préparation au bac et au métier d'instituteur.
À jamais, Joël Delplanque va rester marqué par sa formation. « On était "élève-maître" dès qu'on était entré en seconde. On acquérait un statut social. » Joël Delplanque gardera de ces années essentielles une valeur majeure : la transmission. « S'il y a bien un lieu où la transmission s'exerçait avec force, c'était dans cet endroit. J'ai un exemple précis et très concret que j'ai toujours à l'esprit et que je garderai sans doute encore un bon moment. Il y avait une école d'application, c'est-à-dire une école élémentaire où les instituteurs recevaient les élèves-maîtres pour leur enseigner la manière de faire la classe. D'abord vous écoutiez. Des jours et des jours, au fond de la classe. Vous voyiez l'instituteur faire la classe. Vous regardiez, vous essayiez de comprendre comment ça se passait et puis progressivement, on vous lâchait. "Tu fais la leçon de morale 5 minutes". Puis après t'en faisais 10, puis 15, 20, puis après tu faisais une demi-journée… On avait la capacité à recevoir un enseignement académique et en même temps extrêmement pratique pour les situations concrètes dans lesquelles nous étions plongées. C'est ce que je revis avec les équipes de France. »
« Je ne peux pas ne pas être ému »
Et Joël Delplanque de faire le parallèle entre l'École Normale et les groupes tricolores dans la transmission, l'apprentissage et cette liberté qu'il faut maîtriser quand on vous lâche sur le terrain. « Ce système éducatif, je le vois vivre concrètement avec les femmes et les hommes de l'équipe de France. Ça pour moi, c'est vraiment une très, très grande satisfaction. C'est sûrement la plus grande. »
À l'École Normale, Joël Delplanque a appris un métier. Mais pas seulement. On lui a enseigné aussi une attitude, une façon d'être. Elle forgeait les personnalités. Et aujourd'hui encore, Joël Delplanque ressent intensément la force de cet apprentissage et de ces valeurs. « Je me souviens, on avait de grands couloirs et je vois arriver le directeur de l'école d'application. On était tout seul, lui à un bout, moi à l'autre et on se croise. Quand il est arrivé à ma hauteur, il a soulevé son chapeau et il m'a dit "Bonjour monsieur". J'avais 15 ans. Il devait en avoir, je ne sais pas combien, 60 ? Il nous avait expliqué comment il avait fait l'école pendant la guerre quand il avait 120 gosses devant lui, qu'il n'y avait plus d'instituteur, et ce monsieur-là me salue ! Même quand j'en parle encore maintenant, je ne peux pas ne pas être ému. »
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